À de maints égards, les circonstances que nous traversons auront été propice à la prolifération de narratifs alternatifs, qui ont à la fois profité de la crise de confiance à l’égard du gouvernement, en amplifiant celle-ci.
La pandémie de Covid-19 aura ainsi donné de la vigueur à certaines théories technophobes, qui font par exemple de la 5G un moyen de propagation du virus Covid-19. Les thèses conspirationnistes antérieures à la pandémie mêlant dans un même délire paranoïaque laboratoires pharmaceutiques, grandes banques d’affaires et vieilles rengaines antisémites, ont été dans le même temps actualisées pour l’occasion afin de mieux coller à l’actualité.
L’origine trouble du virus, les doutes sur les conditions de son apparition et de la gestion de la crise par les différents Etats ont offert par ailleurs un terreau à toutes les suspicions. Comme celle, par exemple, d’une création en laboratoire du Covid-19 agitée par le Pr. Luc Montagnier, qui, du haut de sa légitimité de prix Nobel, ont semé un trouble certain – malgré les démentis répétés des scientifiques.
Parmi les théories « alternatives » auxquels adhèrent le plus massivement les Français, celles qui justifient le mouvement contre la vaccination trouvent une résonnance particulière dans le contexte actuel. Le Wellcome Global Monitor 2018 réalisé par l’institut Gallup indiquait que les Français sont le peuple le plus sceptique au monde vis-à-vis de la vaccination. Une situation causée selon les auteurs de l’étude par un manque de confiance dans le gouvernement, dans l’industrie pharmaceutique, mais également dans la science au sens large, et qui ne se dément pas dans le contexte actuel. Selon un sondage réalisé par l’IFOP fin mars, 26% des Français interrogés indiquaient ne pas vouloir se faire vacciner contre le Covid-19, si ce vaccin existait. Un refus particulièrement marqué chez les jeunes femmes, souvent prescriptrices en matière de décisions vaccinales pour les enfants. Les polémiques à répétition concernant la gestion des stocks de masques, de tests et désormais de respirateurs ne peuvent être sans conséquence sur la confiance portée par le grand public à l’égard du gouvernement. De même, le débat sur la chloroquine opposant une médecine éprouvée scientifiquement à des traitements pragmatiques, a produit une certaine méfiance à l’égard de la prudence des autorités. Les critiques, enfin, à l’ égard de certains médecins médiatiques accusés d’avoir minimisé dans un premier temps la situation sont aussi potentiellement ravageuses.
Autant de facteurs qui minent la crédibilité de la parole publique, à l’heure où celle-ci s’impose plus que jamais comme un facteur clé de réussite pour la future sortie de crise