Vers un nouvel hygiénisme ?

La vérité de mars est-elle celle d’avril ou de mai ? Et quid des erreurs des fact-checkers, sauf à les présumer infaillibles bien entendu, quand le discours officiel est aussi ductile et contorsionné ?
vers un nouvel hygienisme ?

La lutte contre les fake news et les discours de haine en ligne appartient, à maints égards, du champ de la santé publique. Il s’agit de surveiller, de monitorer, de contrôler, de réguler, d’endiguer et, bien souvent, de supprimer les tumeurs malignes qui se diffusent de manière virale dans l’espace public. Pourtant, et les dernières semaines nous le rappellent, la science et, plus globalement, le débat scientifique ne sont aucunement exempts de controverses et de dissensus des plus marqués. Sans tomber dans un relativisme exacerbé qui, bien souvent, ouvre la porte à toutes les dérives et tous les délires, constater, a minima, que le consensus autour des faits n’est jamais gagné d’avance est censé inviter à la modestie et à la prudence.

Vérité en-deçà des Pyrénées, erreur au-delà, la citation est connue, reprise à cor et à cri, mais n’en demeure pas moins vraie. Et outre la dimension géographique qu’elle présuppose, il faudrait lui ajouter une dimension contextuelle et temporelle. Quid par exemple du fact checking sur le stock de masques en France, alors même que le gouvernement, avant la crise sanitaire, donnait à penser qu’il n’y avait aucune raison de s’en inquiéter et que, dernièrement, Emmanuel Macron estimait qu’il n’y a jamais eu de pénurie de masques en France. La vérité de mars est-elle celle d’avril ou de mai ? Et quid des erreurs des fact-checkers, sauf à les présumer infaillibles bien entendu, quand le discours officiel est aussi ductile et contorsionné ?

Alors que penser, à l’aune de ce constat, certes sommaire, lorsque les GAFAM entrent dans la danse et statuent sur le vrai et le faux. Que Trump soit le premier à se faire épingler cela n’a rien de bien étonnant, et pour une béta test de ce nouveau process, nul doute que le président américain est un bon client. Un peu comme ces algorithmes qui surperforment sur des datasets d’entraînement et volent en éclats lorsqu’il s’agit de se confronter au monde réel. Par contre, quid de la diffusion de cet outil à d’autres situations et d’autres personnalités, quid également des erreurs qui indéniablement seront commises et quid de l’influence de ce discours prétendument neutre, entendant remettre l’église au centre du village, mais qui n’en demeure pas moins humain trop humain. Autant de questions légitimes que l’hygiénisme numérique ne manque pas de soulever.

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